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Société des Amis des Arts et du Musée de La Cour d'Or
23 mars 2021

Jean Bataille

Jean Bataille

ou le chevalier de Sainte-Ségolène

par Christian Jouffroy

 

Dans la chapelle Notre-Dame de l’église Sainte-Ségolène à Metz, un vitrail du XIVe siècle, œuvre de l’artiste Hermann de Munster, représente le sieur Jean Bataille en tenue de chevalier. Qui était ce noble personnage ? Quels secrets nous cachent ces anciennes verrières médiévales ? C’est l’un des mystères du paraige de Porte-Moselle. Au terme d’une enquête méticuleuse, nous vous livrons une interprétation plausible. Exacte ou fantaisiste ?

 

Les vitraux d’Hermann de Munster en Lorraine

 

Hermann de Munster, originaire de Westphalie (1330-1392)1 est « le premier peintre verrier à être mentionné par les archives du chapitre de la cathédrale Saint-Étienne de Metz. Le 29 août 1381, il se voit allouer une pension viagère de 22 livres pour l’exécution du vitrail du “ grand O ”. Trois ans plus tard, le 2 mai 1384, une commission est chargée de traiter avec Hermann duprixdelarosaceetde“ceuquiy apant ”. Hermann demande des directives au chapitre en décembre 1384, preuve qu’il travaille encore sur les vitraux de Metz. En août 1385, le chapitre emprunte 420 livres pour régler “l’ovraige des varrières de l’O et des fenestres appartenans et despendans dou dit O”, ce qui semble indiquer que les travaux sont à cette date terminés ». L’église Sainte-Ségolène de Metz a aussi la chance de posséder quatre vitraux du maître : les portraits d’un chevalier, d’un notable et de deux nobles dames. Celui qui représente Jean Bataille a été déplacé à plusieurs reprises, surtout depuis le milieu du xixe siècle. Il illumine maintenant la chapelle Notre-Dame, à gauche du chœur, au 3e registre de la baie 9.

Les vitraux de ce verrier conservés à Nancy, par le Musée Lorrain, représentent l’Adoration des Rois Mages et se composent de cinq panneaux : les rois Melchior et Gaspard, surmontés de trois vitres ornementales dans lesquelles on aperçoit quatre petits personnages, un chevalier et trois soldats. La légende voudrait qu’ils aient été créés pour la cathédrale de Metz et déposés en 1785 quand Blondel supprima un registre de la façade pour construire son nouveau portail. Conservés dans la crypte, ils auraient ensuite été installés à Sainte-Ségolène, vers 1804, dans la chapelle Saint-Joseph, puis retirés à l’occasion des travaux de 1898. En 1859, ces vitraux étaient déjà mutilés et seules les figures de deux rois étaient lisibles. Ils ont été donnés à Michel Thiria en vertu de l’article V de la Convention entre l’abbé Dillès, curé archiprêtre de Sainte-Ségolène à Metz, et messieurs Thiria fils et André du 1er février 1898, qui prévoyait que les vitraux anciens non utilisés seraient abandonnés au verrier. Ils ont été achetés par le Musée Lorrain lors de la vente de la succession Thiria en 19382.

En 1898, lors des travaux d’agrandissement de l’église Sainte-Ségolène, Michel Thiria a dessiné 3 un ensemble qui représente sur la même fenêtre Jean Bataille en armure de chevalier et le roi Melchior (fig. 1)

C’est cette figure biblique que l’on retrouve à Nancy, surmonté par des ornements dont un blason qui rappelle celui du paraige du Commun. Malheureusement, il est impossible de savoir si l’artiste a dessiné l’état du vitrail tel qu’il était monté en 1898. Si tel est le cas, il aurait scindé le vitrail avant de n’en reposer que la partie inférieure. Mais le dessin peut aussi représenter un état antérieur à 1785 aujourd’hui perdu. Dans ce cas, le chevalier viendrait peut-être lui aussi de la cathédrale. Et pourquoi ne pas y voir un projet de restitution à Sainte- Ségolène qui n’aurait pas été retenu par le conseil de fabrique en 1898.

 

ILL2

fig.2 Le chevalier et les soldoyeurs messins

Vitrail d'Hermann de Munster, cathédrale de Metz. Cliché Michel Thiria, archives Gabriel Normand

 

Jean Bataille. Lequel ? Jean I, II ou III ?

 

Le seul personnage identifié avec précision sur le vitrail de la baie 9 de Sainte-Ségolène est le seigneur, chevalier ou écuyer Jean Bataille. Ses initiales ornent son ceinturon et ses nom et prénom sont inscrits sur le fourreau ou poche qu’il porte au côté droit. Un écu à ses armes figure à sespieds, issu de celui du paraige de Porte- Moselle : « Fascé d’or et d’azur de huit pièces au franc quartier d’or chargé d’une aigle éployée de sable ». La plus ancienne lithographie représentant ce vitrail est signée Dembour à Metz . Elle est malheureusement erronée dans la mesure où elle indique qu’il s’agit de l’écuyer Gillat Bataille, mort de la peste le 7 octobre 1439 avec, à ses côtés, sa femme Colette Baudoche. Une deuxième gravure, due à l’artiste Bellevoye5, est plus exacte, sauf en ce qui concerne la lecture de la légende du nom de la dame. Il y a trois Jean dans la généalogie de la famille Bataille 6 aux XIVe et XVe siècles. Jean I Bataille était maître échevin en 1285. Lui et sa femme Marguerite 7 sont décédés avant 1336.

Jean II, aman de Sainte-Ségolène, vivait en 1388 et il était mort vers 1397. C’était le fils de Gillat I, le petit- fils de Nicolle, maître échevin en 330, le neveu de Thiébault, maître échevin en 1397, et l’arrière-petit-fils de Jean I.

Jean III était le fils de Gillat II, vivant en 1404, qui était lui aussi aman de Sainte-Ségolène. Il était donc le petit-fils de Jean II. On connait ses épouses : Jeannette Le Gournay puis Jacomette Chaverson, dont Perette, Isabel et Jacomette. Jean III fut à son tour aman de saint Martin ; il fut le père de Gillat III mort de la peste en 1439 sans enfants de Colette Baudoche morte en 1441.

Comme le vitrail est dû au talent d’Hermann de Munster, qui exerça à Metz de 1381 à 1392, notre chevalier n’est probablement pas Jean III. Celui-ci, en effet, était encore très jeune quand l’artiste travaillait à Metz et, ayant vécu assez longtemps pour avoir deux épouses, il est mort bien après le verrier, vers 1459 8. Il est aussi peu imaginable qu’il s’agisse de Jean I, mort depuis trop longtemps et qui est rarement cité dans nos chroniques, pas assez en tout cas pour passer à la postérité. La logique voudrait donc que ce soit Jean II, contemporain de l’artiste.

 

Jean en chevalier à la cathédrale et à Sainte-Ségolène

 

L’image de Jean Bataille, tel qu’il est représenté à Sainte-Ségolène, est presqu’identique à celle qui figure sur la lancette de gauche de la galerie supérieure de la baie 36 représentant la Sagesse et saint Barthelemy, une verrière de la cathédrale Saint-Étienne située en dessous de la grande rose, à l’avers de la façade.

À la cathédrale, le chevalier est debout, dans une attitude martiale (fig. 2). Son coude droit est plié et sa main repose sur la hanche, un doigt de sa main gauche est tendu, montrant un but à atteindre. Il regarde devant lui et semble s’adresser aux deux soldats qui l’entourent. Il ne porte pas d’épée mais il est équipé d’éperons à ses chausses et de gantelets aux mains.

À Sainte-Ségolène, le même chevalier (9R3G)9 est à genoux, mains jointes, implorant le Seigneur. Il a enlevé ses gantelets et rangé son épée mais il a gardé ses éperons. Sur son phylactère il prie « Memento queso mei maria mater dei omnipotensis » (Marie mère de Dieu tout puissant souviens-toi de moi). Dans les deux cas, le nom est inscrit sur le ceinturon à caissons avec un B, un A et probablement un T. Trois interprétations semblent possibles : soit il part à la guerre et demande à la Vierge Marie de le protéger ; soit il en revient et rend grâce pour sa sauvegarde ou sa victoire ; soit il se présente devant Marie après sa mort pour qu’elle intercède en sa faveur devant Dieu. C’est encore ce même chevalier que l’on retrouve à Nancy, au pied du pinacle ornemental de la troisième vitre, au-dessus du roi mage Gaspard.

 

ILL3

Fig. 3.Jean de Bataille en tenue de chevalier.

Vitrail d’Hermann de Munster, église Sainte-Ségolène de Metz. Cliché Gabriel Normand. 

 

Compte-tenu de la taille, le dessin est simplifié. Le chevalier n’a plus d’éléments d’identification mais il a la même armure, le même bascinet, le même pourpoint et les gantelets. Il tient un bâton ou une lance des deux mains.

On aura noté que le personnage est identique au moins sur les deux vitres messines. Pour M. Charet, de Dijon 10, l’armure est typique du xive siècle (fig. 3), et ressemble à celle du saint Georges de la chapelle portative des ducs de Bourgogne à Beaune : bascinet pointu à bec de passereau et visière mobile, colletin à mailles, pourpoint armorié sur ceinture gamboisée, qui recouvre une armure à plates avec des solerets relativement peu allongés, chausses de maille avec jambière et éperons, bras d’armure et gantelets, baudrier et épée. Il signale que « le bassinet du xive siècle est plus élégant que le casque (l’armet) du xve siècle. En 1440 il aurait dû être plus arrondi », ce qui va dans le sens d’une identification avec Jean II. M. Harmand, de Paris, pense qu’il s’agit d’une tenue en faveur de 1380 à 1420 « mais le bascinet à museau pointu est encore usité dans les pays germaniques en 1427 et 1441 ».

 

Les soldoyeurs messins à la cathédrale Saint-Étienne et à Nancy

 

Soldoyeurs

Fig. 4. Les soldoyeurs messins. Musée Lorrain, Nancy. Dessin de Michel Thiria,

1898, archives de l’Académie nationale de Metz 2L4. 

 

À la cathédrale de Metz, Jean Bataille est entouré de deux soldoyeurs 11, gentilhommes ou officiers qui commandaient les piétons et qui semblent prendre ses ordres avant la bataille. Ils sont vêtus de la même manière, celui de gauche un peu plus richement que son compagnon, avec un casque pointu sans visière, descendant à l’arrière pour protéger la nuque, une coiffe en cotte de mailles et des gantelets.

À Nancy, trois soldats semblent précéder le chevalier (fig. 4). Les deux premiers, assez semblables, sont aussi identiques à ceux de Metz. Le troisième, qui tient un bâton, probablement une lance dirigée vers le sol, porte un casque plus léger, sans cotte de mailles et son pourpoint est décoré d’une fleur à l’arrière du col. Le chevalier est protégé par un casque avec une visière relevée mais il n’a pas d’épée.

 

Les femmes de Jean : Isabel et/ou Marguerite

 

ILL4

 

Deux femmes sont représentées sur les vitraux d’Hermann de Munster à Sainte-Ségolène : Isabel et Marguerite. La légende des deux vitres est identique : femme Johan le niesl. Niez ou nies signifie petit-fils, neveu ou descendance 12. Le texte est en place et bien lisible chez Isabel, monté à l’envers chez Marguerite.

Isabel (9R3D) est la plus jeune (fig. 5), à genoux en prière sous une arcade trilobée en pierre jaune évocatrice du sanctuaire. La même architecture se retrouve dans les vitraux de Jean, Marguerite et de l’oncle. Ses mains jointes enserrent un phylactère sur lequel est noté le début du 2e verset du Psaume 101 : « Domine exaudi orationem meam » (Seigneur exauce ma prière). Elle est vêtue d’une robe blanche au col brodé avec une cape bleue, la tête couverte par une coiffe blanche pliée et serrée. Sa bouche est entrouverte, elle réfléchit en souriant. Marguerite (11R4G) est plus âgée (fig. 6), plongée dans un livre d’heures sur lequel est inscrit cette phrase du Psaume 51 verset 17 : « Dominie labia mea aperies et os meum [adnunntiabit laudem tuam] » (Seigneur ouvre mes lèvres et ma bouche [publiera ta louange]). Son phylactère poursuit la citation de celui d’Isabelle (Psaume 101 verset 2) « Et clamor meus [ad] te veniat » (et que mon cri te parvienne). Il faut remarquer que Huguenin, en 185913, ne cite pas ce vitrail alors qu’il évoque tous les autres. À noter aussi que, si les dames de la famille Bataille ont toutes le même manteau bleu, fermé chez Marguerite et ouvert chez Isabel, personne ne porte le moindre bijou. Enfin, pourquoi la prière de ces deux femmes forme-t-elle un tout? Jean I avait bien pour épouse une dame nommée Marguerite 14. Mais elle était l’arrière-grand-mère de Jean, ce qui ne correspond pas à la légende du neveu ou petit-fils. Une autre Marguerite est encore citée dans les jugements en 1336, femme Bataille, mais sans le prénom de son mari. Ce pourrait être la femme de Nicolle, donc sa grand-mère. Quant à Thiébault, son épouse s’appelait Béatrice.

Finalement Isabel pourrait être le prénom de la première femme de Jean II qui aurait épousé ensuite une Marguerite, et Jean II comme ses épouses seraient morts avant l’oncle Thiébault qui a fondé un autel avec une dédicace à sainte Marguerite en l’église Sainte-Ségolène, dans ce cas en mémoire de sa grand-mère et de sa belle-fille. L’hypothèse semble recevable.

 

Marguerite

Fig.6 Marguerite, femme de Jean.

Vitrail d’Hermann de Munster, église Sainte-Ségolène de Metz. Cliché Daniel Bastien,
DRAC Lorraine, archives Pierre-Edouard Wagner. 

 

L’oncle ou le grand-père de Jean : Thiébault ou Nicolle

 

Admettons que Jean Bataille est le petit-fils ou le neveu de l’autre personnage masculin (11R3D) peint par Hermann de Munster. Celui-ci, plus âgé (fig. 7), est représenté sous les traits d’un homme aux cheveux courts, blonds bouclés avec une barbe, vêtu d’un manteau brun-rouge, avec un col et des manches vertes, à genoux en prière. Son phylactère note le début du Psaume 51, dit « de pénitence » : « Miserere mei deus secundum magnam misericordiam tuam » (Mon Dieu, prends pitié de moi selon ta grande miséricorde). Il est placé sur la même baie que Marguerite, mais à un registre inférieur. Il aurait été possible de le placer au même niveau ; la position inférieure dénote peut-être une marque de respect. Il aurait aussi été possible de le représenter vis-à- vis de Marguerite si elle avait été sa femme ; ce n’est donc probablement pas Jean I ; ni Gillat I pour la même raison. La légende « maisn » reste trop incomplète pour apporter un élément de réponse. Il s’agit probablement du début du mot « maisnie » ou « maisnier », c’est-à-dire un habitant, homme de la famille ou de la suite d’un seigneur.

Peut-être s’agit-il de Thiébault Bataille, l’oncle de Jean II, qui a fondé l’autel Sainte-Marguerite. Un autre autel fut encore élevé par Jean Bataille 15 à Sainte-Ségolène, ce qui conforterait l’idée de Marguerite deuxième femme de Jean. Mais ce pourrait être aussi Nicolle Bataille, le grand-père de Jean II.

 

Citains et gens de métiers

 

Sur les mêmes baies historiques de l’église Sainte-Ségolène de Metz, d’autres vitraux nous interpellent. Des personnages aux costumes noirs sont probablement ceux de donateurs, parfois simples gens de métier 16, qui ne font pas partie des grandes familles patriciennes mais sont affiliés aux paraiges. Ils sont réduits à une figuration, sans précision de lieu identifiable.

 

Jean Divoise

 

Jean Divoise (9R5D) est vraisemblablement originaire de la ville d’Yvois (fig. 8), dans le comté de Chiny, l’actuelle Carignan, vendue à la fin du XIVe siècle à Jean l’Aveugle de Luxembourg. Il est représenté jeune, en prière, avec des cheveux filasse et la bouche ouverte ou des lèvres charnues qui lui confèrent un aspect benêt ou naïf. En face de lui, sa femme Jeanne (9R5G) est manifestement plus posée (fig. 9), elle prie avec son chapelet, agenouillée sur un tapis d’herbe, vêtue d’une tenue noire avec des plis multiples et une coiffe nouée sous le menton. Elle est jeune, avec l’aspect soucieux ou désabusé, la tête couverte d’une béguine souple et d’un voile noué sous le menton.

Jacques (9R7G) venait d’Alsace (fig. 10) et il était marchand en Aiest, la grande rue du quartier. Il était jadis placé sur la lancette droite et la position a été inversée lors d’un remontage de la vitre. Il donne une impression d’homme âgé, rusé, avec son nez pointu, un front proéminent, une coupe au bol et des yeux grand ouverts. Sa tenue noire s’orne d’un col en fourrure, témoignage de sa fortune. 

 

Jacques d'Alsace

 

Devant lui, mais sans lui faire face, on découvre une femme (9R7D) qui ne correspond pas au vieux Jacques (fig. 11). Son visage est strict, elle porte une coiffe au bord festonné élégante. Elle prie son chapelet, plongée dans son livre de prières. Il reste à comprendre pourquoi elle est à genoux sur un sol à damiers noir et blanc, à côté d’une bassine en bois cerclée. Est-ce simplement pour évoquer une demeure particulière plutôt que l’église ?

 

Les magistrats

 

Sur les vitraux d’aspects plus récents et de facture plus grossière, les femmes ont des robes bleues, une coiffe blanche et l’homme un manteau bleu avec des bas et une écharpe rouge. Tous sont en prière, mains jointes, à genoux.

Catherine (9R2G) est la femme de Jehan, un échevin de l’église selon Huguenin, mais elle est aussi la « mère ledit prêtre de céans » (fig. 12). Elle est en prière et tient dans ses mains un chapelet. Coiffée d’un voile flottant, elle donne une impression de sagesse et de quiétude en demandant « Miserere mei deus » (prends pitié de moi, mon Dieu). Devant elle, la vitre sur laquelle figurait son mari ou son fils a malheureusement disparu. Elle était encore en place vers 1930 (fig. 13). Sa prière complétait celle de son épouse « secundum magnam misericordiam tuam (selon ta grande miséricorde). Curieusement, ce phylactère reprend les termes du Psaume 51, celui du personnage que nous avons considéré comme étant probablement Nicolle ou Thiébault Bataille.

Un autre échevin, sa femme Perette, une autre femme et sa fille, sont réunis en vis-à-vis (11R5 DG). Peut- être ont-ils tous été victimes d’une épidémie de peste qui sévissait à l’époque ? À droite Jehan Alz (ou Dex), échevin de céans et Perette. L’homme est en prière, ses cheveux blonds contrastent avec un manteau bleu et une écharpe rouge. La femme, habillée d’une robe bleue avec une guimpe, a un visage désabusé. Ils font face à un couple de jeunes femmes : leurs fille et petite-fille ? L’une porte sa coiffe nouée sous le cou et l’autre libre ; la première était-elle mariée ? La plus jeune, étonnée, s’appelait Marion. Tous demandent « Jésus qui volt por nous soffry vostre gloire per graice veullez nous offrir » et « Jesus- Christ faictes nous la graice de voir en vostre gloire vostre percioul viaire (visage) ».

Au final, les vitraux médiévaux de l’église Sainte-Ségolène à Metz rappellent la mémoire de Jean Bataille, probablement accompagné pour l’éternité par ses deux épouses, la première Isabel et la seconde Marguerite, son grand-père Nicolle, maître- échevin de Metz en 1330, ou son oncle Thiébault, maître-échevin en 1397. Entouré de soldats, le chevalier a peut-être participé à quelque grand fait d’armes qu’il dirige à la cathédrale et pour lequel il implore la faveur divine ou dont il rend grâce à Sainte-Ségolène. Quoi qu’il en soit, tout nous oriente vers cette idée que l’église Sainte-Ségolène a été pour plusieurs générations la nécropole de la noble famille Bataille aux XIVe et XVe siècles. 

 

catherine 

Fig. 12 Catherine, femme de Jean.

Vitrail de l’église Sainte-Ségolène de Metz. Cliché Gabriel Normand. 

 

mari

Fig. 13 Mari ou fils de Catherine. Vitrail disparu de l’église Sainte-Ségolène de Metz.

Cliché Michel Thiria, archives de l’Académie nationale de Metz 2L4 

 

Notes 

  1. 1  Hermann de Munster [en ligne], Wikipédia [consulté le 21.11.2019], disponible sur https://fr.wikipedia.org/wiki/Hermann de_M%C3%BCnster

  2. 2  Grodocki L., Bulletin monumental 127/1, 1969, p. 46.

  3. 3  Archives de l’Académie nationale de Metz (ANM 2L4)

  4. 4  D’Elstein G., Metz-la-Charitable, Paris, Le Carnet, 1902, p. 13 et De Saulcy et Huguenin l’ainé, Relation du siège de Metz en 1444, Metz, Troubat, 1835, p. 190.

  5. 5  Gérard d’Hannoncelles J.F.G., Metz ancien, Metz, Rousseau-Pallez, 1856, t. II.

  6. 6  Id., t. I.

  7. 7  Dosdat G., Rôles de bans, Thèse 1380, 1336/356.

  8. 8  Le vitrail en Lorraine du XIIe au XXe siècles, Inventaire général de Lorraine, 1983. 

  9. 9 Les vitraux sont désignés par le numéro de la baie (9 ou 11), celui du registre (1 à 9) et la situation (Gauche ou Droite).

    10 Archives ANM 2L4. 

    11  D’Elstein, Metz-la-Charitable, p. 29.

    12  dom Jean-François, Vocabulaire austrasien, Metz, Collignon, 1773, p. 94 et Greimas A., Dictionnaire de l’Ancien Français, Malesherbes, Larousse, 1993. 

    13 Huguenin A., Notice historique sur l’église Sainte-Ségolène de Metz, Metz, Rousseau-Pallez, 1859.

    14 Dosdat G., Rôles, note 7. 

    15 Dorvaux, Pouillé XVIe, p. 138.


    16 Prost A., Le patriciat dans la cité de Metz, Paris, 1873, p. 170. 

     

    Article extrait de la revue Chancels 2021

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