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Société des Amis des Arts et du Musée de La Cour d'Or
14 novembre 2016

En Forêt, d'Emile Michel

 

En forêt d’Émile Michel

par Raphaël Mariani

 

En forêt

En forêt

É. Michel, Salon de 1894, huile sur toile, s. d. b. g., 147 × 200 cm,

inv. 2009.5.1 © Musée de La Cour d’Or – Metz Métropole/Jean Munin

En 2009, la Société des Amis des Musées de Metz a fait don au Musée de La Cour d’Or – Metz Métropole d’un paysage de grand format du peintre Émile Michel (1828-1909). L’acquisition de cette œuvre majeure est venue consacrer l’art du plus talentueux paysagiste messin du XIXe siècle. Émile Michel, de la Lorraine à Paris François-Émile Michel naît à Metz, place Saint-Louis, le 19 juillet 1828. Fils d’un marchand de vin, il entre au lycée de Metz d’où il sort bachelier en 1845. L’École d’application de l’Artillerie et du Génie, présente à Metz dès 1802, pare la carrière des « armes savantes » d’un prestige auquel ses parents ne sont pas insensibles. Destiné à l’École Polytechnique, Émile Michel doit suivre deux années durant à Paris les cours de mathématiques de l’école de Sainte-Barbe qui compte parmi les écoles privées préparant aux grandes écoles scientifiques. À la faveur de la Révolution de 1848, il convainc ses parents de le laisser revenir à Metz afin de se consacrer à la peinture.

Ce revirement répondait à une inclination précoce. Michel avait reçu au lycée de Metz les cours de dessin du peintre Auguste Migette, figure de l’« École de Metz » et pédagogue estimé. C’est lors de ses excursions avec son maître en Moselle, au Luxembourg et en Allemagne que vint à Michel l’idée « qu’il n’était pas de situation comparable à celle du paysagiste appelé à vivre ainsi dans un commerce intime avec la nature, à l’étudier tous les instants, à se pénétrer de ses beautéà essayer de les rendre. »

En 1852, il effectue un voyage en Italie où il rencontre des pensionnaires de la villa Médicis, notamment les peintres Paul Baudry et Alfred de Curzon qu’il retrouvera plus tard à Paris. De 1853 1908, Michel présente avec assiduité ses paysages au Salon. La Chasse sur la Falaise (Paris, musée d’Orsay) lui vaut une médaille en 1868. Il est récompensé à nouveau aux expositions universelles de 1889 et 1900. Membre, puis plusieurs fois président, de l’Académie de Metz, il quitte sa ville natale annexée pour Nancy en 1872. Il y trouve des amis d’exil (Devilly, Pêtre, Lemud) et s’investit dans la vie artistique locale en devenant membre de l’Académie de Stanislas et de la commission du musée de Nancy.

Fuyant « l’isolement forcé de la vie de province », il s’installe à Paris en 1880 et fait bientôt partie de la commission de restauration du musée du Louvre et du conseil des musées nationaux. Émile Michel a entamé à Paris une activité de critique et d’historien de l’art, tournée principalement vers l’étude de la peinture flamande et hollandaise.De 1887 1900, il apporte sa contribution à la vogue des peintres nordiques par de nombreuses monographies d’artistes (Ter Borch, Ruysdael, Hobbema, Bruegel, Rembrandt, Rubens...).Mais l’étude de la nature reste sa véritable passion dont le volume sur Les Maîtres du Paysage, publié en 1906, constitue l’aboutissement. Le 19 mars 1892, son entrée à l’Académie des Beaux-Arts, en succession du comte de Nieuwerkerke, couronne son cursus honorum artistique. Deux ans plus tard, il est fait chevalier de la Légion d’honneur et officier en 1903. Il meurt à Paris le 23 mai 1909.  

En forêt, paysage bellifontain 

Le tableau En forêt appartient aux grandes compositions qu’Émile Michel a réservées au Salon.  Exécutée en 1894, elle est présentée la même année au Salon où elle attire l’attention de l’écrivain Roger Peyre : « M. Émile Michel n’a jamais eu plus d’autorité. La largeur et la fermeté avec laquelle ses arbres sont dessinés, la solidité des terrains et des rochers couverts de mousse, la simplicité de l’effet lumineux, font de sa toile intitulée En forêt un des plus beaux paysages du Salon. » Michel a inlassablement traité le thème de la forêt tout au long de sa carrière et exposé au Salon plusieurs paysages de format similaire sous le titre En forêt. Les peintres messins du XIXe siècle avaient trouvé dans la campagne lorraine une source d’inspiration, en particulier dans la forêt de Rémilly ou la forêt séculaire du parc de la Grange-aux-Ormes, aménagé par le comte Léon d’Ourches (1766-1843) entre Marly et la Seille. Michel gardera un souvenir vivant de ces lieux où il s’était formé à la peinture de paysage et déplorera à la fin de sa vie que les constructions militaires, ferroviaires et industrielles aient « complètement modifié et enlaidi les aspects de la campagne messine ». En s’établissant à Paris, il retrouve dans la vallée de Chevreuse et dans la forêt de Fontainebleau des lieux de ressourcement et d’inspiration.

En 1891, il fait l’acquisition de la maison du paysagiste Auguste Allongé à Bourron-Marlotte, à la lisière sud de la forêt de Fontainebleau. Découverte par les écrivains romantiques dans les années 1820, cette forêt a été le lieu d’un profond renouvellement de l’art du paysage. Elle constitue pour les peintres et les photographes un magnifique atelier grandeur nature. La variété de ses paysages – futaies, gorges, rochers, lande, sable – nourrit l’imagination des artistes jusqu’à Redon, Seurat, Derain, et même Picasso. En forêt appartient aux paysages bellifontains d’Émile Michel. Au centre du tableau, un amas de rochers moussus s’élève devant un bouquet de pins dont la ramure se détache à contre-jour sur des arbres lointains. Le site pittoresque, les effets de lumière traités avec exactitude et l’attention accordée à la végétation pourraient laisser croire à un naturalisme uniquement descriptif. Cependant, Émile Michel récuse « l’imitation stricte et sans choix de la nature » autant que l’impressionnisme dont il déplore, selon l’opinion commune en son temps, « cette lumière écrasante dont on aime nous aveugler aujourd’hui, qui dépouille sans pitié les objets de leur forme et les condamne à traîner derrière eux ces ombres d’un bleu violent et grossier qui sont, paraît-il, le dernier mot de l’école du plein air. » Michel se veut un peintre de l’entre-deux, celui d’un équilibre entre réalité et invention faisant des études au « dessin bien serré » préalables à une recomposition en atelier.

Ces études sont restées pour Michel des documents de travail constituant un répertoire personnel de motifs et dont une sélection ne sera diffusée, qu’en 1909 par une publication posthume. Cette conception toute néoclassique a relégué Michel dans une impasse anachronique du paysage français dont il faudrait sauver Harpignies, Pointelin ou Zuber. Roger Marx distingue le « tempérament d’exception » de ces peintres pour les opposer aux copieurs de nature ne produisant plus que « de sèches et misérables définitions géographiques ». La composition vigoureuse d’En forêt qui tronque les arbres pour faire des rochers le principal motif, son grand format joint au réalisme de la description lui donnent la force et l’immédiateté du réel. Les photographies au collodion réalisées en forêt de Fontainebleau par Le Gray, Marville ou Cuvelier traduisent un intérêt similaire pour la subtilité de la lumière et le rendu de ses moindres variations. Mais ce réalisme descriptif doit sans doute autant à l’influence de la photographie qu’à une évolution intrinsèque de la peinture académique vers un rendu méticuleux des valeurs et des demi-teintes. Cette évolution oriente la peinture d’Émile Michel vers un rendu scrupuleux de la couleur, servi par une touche tatillonne, ce que le critique Paul Leroi appellera ses « trop constants excès de conscience » du peintre une « seconde main » vouée à traduire la beauté des formes créées par Dieu.

Attaché au travail sur le motif, il prône des études au « dessin bien serré » préalables à une recomposition en atelier. Ces études sont restées pour Michel des documents de travail constituant un répertoire personnel de motifs et dont une sélection ne sera diffuséequ’en 1909 par une publication posthume9. Cette conception toute néoclassique a relégué Michel dans une impasse anachronique du paysage français dont il faudrait sauver Harpignies, Pointelin ou Zuber. Roger Marx distingue le « tempérament d’exception » de ces peintres pour les opposer aux copieurs de nature ne produisant plus que « de sèches et misérables définitions géographiques » La composition vigoureuse d’En forêt, qui tronque les arbres pour faire des rochers le principal motif, son grand format joint au réalisme de la description lui donnent la force et l’immédiateté du réel.

Les photographies au collodion réalisées en forêt de Fontainebleau par Le Gray, Marville ou Cuvelier traduisent un intérêt similaire pour la subtilité de la lumière et le rendu de ses moindres variations. Mais ce réalisme descriptif doit sans doute autant à l’influence de la photographie qu’à une évolution intrinsèque de la peinture académique vers un rendu méticuleux des valeurs et des demi-teintes. Cette évolution oriente la peinture d’Émile Michel vers un rendu scrupuleux de la couleur, servi par une touche tatillonne, ce que le critique Paul Leroi appellera ses " trop constants excès de ses moindres variations". Mais ce réalisme descriptif doit sans doute autant à l’influence de la photographie qu’à une évolution intrinsèque de la peinture académique vers un rendu méticuleux des valeurs et des demi-teintes. Cette évolution oriente la peinture d’Émile Michel vers un rendu scrupuleux de la couleur, servi par une touche tatillonne, ce que le critique Paul Leroi appellera ses « trop constants excès de conscience ». 

 

Photo 1

Saut de la Couze à Saillant

É. Michel, 1901, fusain avec rehauts de craie blanche, 53 × 43 cm
© Musée de La Cour d’Or – Metz Métropole/Laurianne Kieffer 

 

Émile Michel au Musée de La Cour d’Or

La Société des Amis du Musée de Metz a fait l’acquisition d’En forêt sur le marché de l’art en 1999. Elle en a consenti le dépôt au Musée de La Cour d’Or avant de lui en faire don en 2009 à l’occasion de l’ouverture d’une salle du parcours permanent dédiée aux artistes de l’« École de Metz ». Cette œuvre majeure de la période parisienne d’Émile Michel est venue opportunément enrichir un ensemblde quatre peintures et un dessin, rendu peu significatif depuis le renvoi en 1970 de deux tableaux déposés par l’État, Chasse sur la falaise et Semailles d’automne. L’achat de trois dessins et deux petites esquisses à l’huile auprès des descendants du peintre Théodore Devilly est venu abonder en 2011 un fonds qui permet aujourd’hui au musée de Metz de représenter dignement l’un des plus talentueux paysagistes de la Lorraine.

 

Etang de Senlis

Étang près de Senlisse É. Michel,

fusain avec rehauts de craie blanche sur papier bleu, 36 × 50 cm

© Musée de La Cour d’Or – Metz Métropole/ Laurianne Kieffer 

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Commentaires
E
Il n’est pas toujours aisé de savoir vers qui se tourner lorsque nous nous retrouvons devant une situation inconfortable. Aussi, si vous désirez couper vos arbres qui vous dérangent, passez par notre société pour un travail de qualité et une performance d’action redoutable. Un seul site : http://buchwalter-aabtp.com/.
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Société des Amis des Arts et du Musée de La Cour d'Or
  • La Société est destinée à promouvoir le Musée de La Cour d'Or à Metz, à favoriser l'enrichissement de ses collections et à encourager les artistes lotharingiens par l'attribution d'un prix, la diffusion de leurs oeuvres et l'édition d'une revue "Chancels".
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